HISTOIRE – Cela aurait été un bel hommage rendu à l’un des derniers goumiers marocains mort récemment. En Corse, des membres du groupe d’opposition « Mouvement corse démocrate » (MCD) souhaitaient baptiser une rue de Bastia du nom de Ali Nadi, un des combattants marocains enrôlés aux côtés de la France pendant la deuxième guerre mondiale. Il avait participé, en 1943, à la libération de la Corse de l’occupation allemande.
Mais le conseil municipal de la ville, composé en majorité de nationalistes, en a décidé autrement. La motion déposée mardi 19 décembre par le MCD a été rejetée. « Le groupe municipal d’opposition regrette que la majorité du conseil municipal refuse de dénommer une rue du nom d’un des derniers goumiers, Monsieur Ali Nadi », explique au HuffPost Maroc Julien Morganti, vice-président de la communauté d’agglomération de Bastia et membre du MCD.
« Le maire a considéré qu’il préférait faire un hommage global, en rebaptisant une rue du nom de l’ensemble du régiment marocain, sauf qu’il y a déjà une rue qui porte le nom d’un bataillon marocain. Nous voulions que ce soit un hommage personnel, pour que ce soit plus parlant pour les nouvelles générations », ajoute-t-il. « C’est pour cela que nous avions fait un compromis, pour rebaptiser cette rue du nom d’Ali Nadi, au nom de l’ensemble des Marocains qui ont libéré la Corse et Bastia », souligne-t-il. « Pour nous, c’est important, dans l’acte de renommer une rue, que ce soit personnalisé ».
Parallèlement, à Ajaccio, plus grosse ville de Corse, une conseillère municipale nationaliste vient de déposer une requête pour baptiser une rue, une place ou un centre culturel de la ville du nom d’un nationaliste corse récemment décédé. « Pour une catégorie de gens, on généralise, et pour l’autre, on personnalise. Ce n’est pas acceptable, on doit traiter tout le monde de la même manière », déplore Julien Morganti, qui n’exclut cependant pas de déposer une nouvelle requête au conseil municipal, alors que la Corse s’apprête à célébrer, en octobre 2018, les 75 ans de sa libération.
« Lion de l’Atlas »
Ali Nadi, mort récemment dans le Haut-Atlas selon les médias corses, avait participé en octobre 1943 à la libération du premier département français lors des combats contre les Allemands sur le col de Teghime, dans les hauteurs de Bastia. Né en 1924, le sergent-chef Ali Nadi était officier de la Légion d’honneur, titulaire de la médaille militaire et de la Croix de Guerre 39-45. Il avait été décoré par le Général de Gaulle qui lui avait donné le surnom de « Lion de l’Atlas ».
Le choix de baptiser une rue de la ville du nom de cet ancien combattant marocain n’était pas anodin. Les dernières élections territoriales organisées le 10 décembre en Corse ont été remportées haut la main par les nationalistes. « Au moment où la Corse se vit pour certains comme un territoire à part, je pense qu’elle se doit de rappeler que nous avons besoin de tout le monde pour évoluer dans notre humanité », nous confiait la semaine dernière François Tatti, président de l’agglomération de Bastia et du MCD.
Cette motion visait ainsi, « dans un contexte national de repli identitaire », à dire aux générations futures que « des gens qui ne connaissaient pas la France se sont engagés pour elle et que certains sont morts pour la libérer des nazis », indiquait Julien Morganti.